samedi 12 avril 2014

Dark girls documentary


Lors de son discours de remerciement aux oscars, l'actrice Lupita Nyong'o a évoqué une lettre de fan  lui exprimant sa gratitude pour l'avoir aidé à s'accepter comme femme à la peau noire, non pas marron, claire, caramel, ou toute autre nuance que l'on associe souvent, mais noire.
L'actrice confessait récemment avoir dans sa prime jeunesse eut du mal elle aussi à s'accepter comme belle du fait de sa couleur de peau si foncée.
Fort heureusement, elle a depuis appris à reconnaitre la vraie beauté de sa couleur de peau, une beauté parmi les autres ni plus ni moins.


Un mal loin d'être singulier, que ce soit en Afrique, les Caraibes, en Amérique, en Asie le complexe de la peau non blanche est très présent.
Nul ne niera les impacts et ressorts psychologiques que l'esclavage et le colonialisme a laissé sur les peuples qui en ont souffert. Au delà des dégâts financiers, économiques, une aliénation est née de la répétition constante de l'infériorité des peuples soumis, le colon devenant ainsi LA référence, même pour ce qui est des critères physiques.

Dans Peau noire, masques blancs, de F. Fanon, il est justement question de cette névrose chez l'homme noir inhérente aux effets psychologiques dévastateurs de la colonisation sur la conscience de soi, sur l'estime de soi. 
Fanon, psychanalyste de son état, nous décrit le schéma  de pensée dans lequel s'enferme le colonisé, et comment ce dénigrement constant du colonisateur devient sien.
Insidieusement, de génération en génération, cette mésestime s'est transmise au quotidien:
  • une amie qui vous complimente pour votre peau, non pas parce qu'elle est saine, lumineuse, mais bien parce qu' "elle est claire,  presque métissée", comme si le soupçon de sang blanc était une vertu
  • un homme noir dans la rue qui vous dit qu'il n'aime que les femmes claires comme vous, mais pourquoi ne coiffez vous pas vos cheveux crépus, entendez les défriser ou les tisser
  • une cousine/connaissance/soeur qui s'use la peau à force de crèmes éclaircissantes, et se réjouit que ses enfants aient la peau claire
  • une enfant qui ne se trouve pas belle parce que "trop" noire
Autant d'exemples de rejets souvent inconscients, de ses caractéristiques d'homme, femme noir(e).
Lorsque qu'il ya 10 ans j'ai décidé de ne plus défriser mes cheveux il m'a fallu faire face aux questions et remarques désobligeantes venants surtout de mon entourage, de personnes cultivées, intelligentes, brillantes et étonnamment à la fois prisonnières de cette image de la beauté noire qui pour être reconnue doit forcément être la pâle copie de la beauté caucasienne!
Combien de fois m'a-t-on demandé si vraiment j'avais l'intention de sortir avec les cheveux en afro? si vraiment j'avais l'intention de me présenter au travail les cheveux non tressés ou tissés, ou au moins puisque têtue j'étais je devais au moins avoir la décence de les tirer en pompom*
Tout çà comme si pour être crédible professionnellement, pour être jolie aux yeux du monde extérieur, "de ceux qui comptent", il nous fallait nécessairement gommer autant que faire se peut tout ce qui nous révèlerait Noir(e)!

En 1966, Nina Simone, frustrée, en colère de la faible estime de soi qu'ont les femmes noires américaines, et les difficultés quotidiennes qu'elles ont à affronter, elle la premiére, en tant que "Dark girl" - femme noire à la peau sombre - nous raconte dans Four women, l'histoire de 4 archétypes de femme noires américaines  
Aunt Sarah, Saffronia, Sweet Thing and Peaches. 



 
Le documentaire "Dark Girls"  à voir ci en dessous, apporte quelques éclairages sur la question, vue des états unis; levant le voile sur la perception de la peau noire et ses nuances au sein d'une société américaine, encore marquée par l'esclavage, les noirs à la peau claire se faisant passer pour blancs, la ségrégation etc..




Heureusement, les consciences changent, s'éveillent, l'explosion des blogs dédiés à la beauté de la femme noire est à la fois la cause de cet éveil et sa conséquence.

Pour moi je n'y vois ni futilité, ni militantisme exacerbé, mais simplement la réponse à au besoin évident que tout individu a de se voir rappeler quelques fois sa valeur. Entendre, voir, des femmes noires, marrons, caramel, métisses, être fières, radieuses, insolemment belles en sublimant leurs atouts naturels, est une source de réconfort, de réassurance, et d'inspiration pour celles qui souffrent encore de cette aliénation de l'esprit, ne leur faisant valoriser que la beauté caucasienne mais surtout dévaloriser, voir discriminer la beauté noire.

les iconiques Grace Jones, Naomi Campbell avaient déjà ouvert la voie aux beautés noires, Lupita irradie les pages de une des magazines les plus en vogue.....
Alors haut les coeurs, et sans fierté mal placée, n'ayons pas peur d'affirmer un vigoureux et convaincant Black is beautiful!



*pompom: la mini queue de cheval qui du fait de la longueur des cheveux ressemble plus à une queue de chihuaha :-) 


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